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Lilie Bagage  

Puce et Globule : 10 trucs que j’ai appris sur l’écriture jeunesse – 2ème partie

Hello les loulous !

Me voici de retour pour les 5 autres trucs que j’ai notés sur l’écriture jeunesse et que je me devais de partager 🙂 (Pour la première partie, c’est par là)

  • 6. Des deus ex machina plutôt bien tolérés

Ah ! Ça, c’est un truc drôlement chouette pour les auteurs qui, comme moi, adorent les deus ex. (oui je sais, je devrais pas dire ça à voix haute, on va me balancer plein de tomates sur la tronche juste pour avoir osé dire que j’aimais ce genre de facilités d’intrigues). Plus sérieusement, c’est souvent le genre de procédés qu’on évite en littérature adulte, parce que « Whaaaaat ? Nan mais attends là, d’où est-ce qu’il arrive, ton personnage qui sauve tout le monde ? tu expliques rien, ça fait 400 pages qu’on l’a pas vu et là comme ça, il débarque, il fait un carnage et les gentils gagnent la guerre ? » >>> forcément ça fait tache (et on comprend la réaction du lecteur).

Seulement en jeunesse : vous avez le droit.
Je ne dis pas qu’il faut en abuser, mais les jeunes lecteurs sont plus tolérants que les adultes là-dessus. Un ami explique souvent cela par le fait que, dans la vie d’un enfant, finalement, les deus ex machina sont monnaie courante : ils en vivent tous les jours, des trucs « magiques », des trucs qu’ils ne peuvent pas expliquer, parce que l’explication se trouve dans une couche de l’univers encore inaccessible pour eux. Et puis aussi, parce qu’en terme de structures de récits, ils ont forcément moins d’années de lectures/visionnages de films derrière eux que les adultes, et ils sont donc moins « regardants ».

  • 7. On parle de tout, mais on simplifie la construction

C’est un peu en lien avec le point 2. (sur l’ambiguïté, vous vous souvenez ?). En jeunesse, il est vraiment conseillé d’être clair, presque didactique dans sa façon d’amener des idées, de présenter des personnages et de construire des histoires. On peut aborder tous les sujets, des plus durs (l’isolement, la maltraitance, la séparation, le deuil) aux plus pointus (comme la philosophie, la chimie, ou bien… l’immunologie, par exemple ? *sifflote*), mais il est important je crois d’équilibrer cela avec une intrigue simple (sans qu’elle soit « simpliste ») et claire pour le lecteur.

On a donc tendance à éviter des récits à plusieurs voix, ou avec un narrateur pas très identifié, ou bien avec de multiples arcs entrecroisés (de toute façon, dans un volume de 50 000 signes, je vous mets au défi de croiser plusieurs arcs d’intrigue. Allez-y ! chiche !)…
Ceci étant dit, avec les plus grands des petits lecteurs (9-10 et après…), vous pouvez vous permettre de plus en plus de fantaisies là-dessus.

  • 8. Montrer, montrer, montrer… mais penser à dire, aussi.

Beaucoup d’entre vous connaissent sans doute la fameuse maxime « show don’t tell » (« montrer, ne pas dire ») des écrivains actuels. Il est plus intéressant de « montrer » qu’un personnage s’énerve par ses actes (ou une réplique), plutôt que de simplement « dire » « Bidule est énervé ». Avec les adultes, il est même conseillé de se reposer de façon exclusive sur le « show » et de laisser l’implicite faire son oeuvre.

Seulement, chez les enfants, trois fois sur quatre, l’implicite leur passe 10 kilomètres au dessus de la tête. Là encore, je pense qu’ils manquent simplement d’expérience (en matière de récit et d’histoire) et qu’ils vont donc être,de façon générale, des lecteurs plus candides que les adultes. Chance pour nous autres, les auteurs : ils sont de fait plus tolérants au « dire » et à l’explicite dans le texte. Par conséquent, je pense qu’il est important (et même nécessaire), a fortiori dans les premiers textes lus de façon autonome par les enfants (= sans l’accompagnement des parents), d’accompagner le fait de « montrer » par du « dire ». Si je reprends l’exemple de Bidule qui s’énerve, un enfant ne s’étonnera pas de voir écrit :

Bidule est énervé. 
— J’en ai marre de Muche, dit-il. Il me vole tous mes bonbons.

Plutôt que d’une version pour plus âgés qui se passerait bien de la phrase introductive. (A noter que, sans doute, les albums pour les touts petits, bénéficiant du support de l’image, peuvent sans doute se passer d’explicite dans le texte — à voir comment cela s’équilibre entre image et mots)

  • 9. Parlez de ce qui leur ressemble et de ce qu’ils vivent…

Chez l’enfant lecteur, l’identification est à mon sens un levier important pour susciter l’intérêt. Le fait de raconter une histoire en s’appuyant sur ce qu’il connait déjà, sur ce qui est familier (les parents, la famille, l’école, les amis, les jeux, le coucher, les repas, les rituels, etc.) permet de créer du lien, d’aider l’enfant à se projeter plus facilement dans le récit, de le vivre et de ressentir des émotions grâce à lui. C’est à mon avis pour cela que les romans jeunesse mettent en scène des enfants proches de l’âge du lecteur et parlent si souvent de leur quotidien.
Et je pense que ça va même plus loin, notamment dans le choix des images, des comparaisons, bref du travail sur le style : quand tout « parle » au lecteur, même dans les plus petits détails, cela évite les risques de décrochage.

  • 10. … Mais parlez-leur aussi de ce qui les fait rêver !

Il y a un truc rigolo, qui n’est pas une règle mais qui s’applique souvent. Quand on cible un lectorat de X ans, on met plutôt en scène des enfants de X + 2 ans. Ce n’est pas systématique, mais fréquent. Pour quelle raison ?
Eh bien je pense que c’est une manière positive de parler du futur aux enfants. De leur futur à eux, proche, palpable, celui qui deviendra leur présent dès que les vacances d’été seront passées et que l’école recommencera. On leur montre un quotidien dont ils rêvent, un quotidien qu’on peut saupoudrer d’imaginaire et qui sera peut-être bientôt là… Un quotidien pour lequel l’attente sera juste assez longue pour leur donner envie de dévorer le livre.

Cette littérature-là, c’est une façon de leur faire aimer les lendemains 🙂
Voilà, j’espère que ces 10 trucs sur l’écriture jeunesse vous auront donné d’en lire et d’en écrire aussi. Je vous fais plein de bisous, et je retourne gribouiller des histoires !

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0 thoughts on “Puce et Globule : 10 trucs que j’ai appris sur l’écriture jeunesse – 2ème partie

  1. Anaïs La Porte

    Très intéressant d’avoir ta vision des choses ! Personnellement, j’essaie aussi d’intégrer des ingrédients que j’adorais trouver dans les romans que je lisais à cet âge : le manoir mystérieux, l’inondation qui bouscule tout sur son passage et qui pousse les héros à passer en bateau en plein milieu de leur ville…

    1. liliebagage

      Ah oui ! Comme une plongée dans tes propres souvenirs, au final 🙂 Je comprends tout à fait, c’est enrichissant et je pense que ça contribue beaucoup à transmettre certains éléments récurrents dans les histoires et les mythes

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